« À LA FIN DE SA VIE, Degas allait chez les gens décrocher les tableaux qu’il avait vendus. Il voulait toujours y rajouter un petit quelque chose ! » Régis Di Giorgio a l’œil pétillant de malice quand il conte cette anecdote sur le peintre. Lui-même l’avoue, dans un éclat de rire : il ne faudrait pas le pousser pour qu’il débarque chez ses lecteurs pour apporter d’infimes modifications à son « Germain » !
Perfectionniste ? Ce sympathique et tout jeune quadragénaire a en tout cas mis douze ans, « jour pour jour », précise-t-il, à écrire ce premier roman. Remarquablement bien écrit, avec un style fleuri, presque suranné, « Germain » est un livre à clé. Le lecteur y suit en parallèle l’histoire de Germain, voyageur qu’on imagine vivant à la fin du Moyen âge, et la quête de l’actuel Hugo, un éditeur, qui enquête sur un manuscrit laissé par le premier. Du moins, on l’imagine.
CHACUN SA ROUTE !
Sous-titré « Labyrinthe », le livre nous fait emprunter les méandres à la fois de l’histoire, du temps et de l’espace. Avec toujours la question sous-jacente : est-ce bien vrai ? « J’ai fait des recherches pour certaines parties du livre », reconnaît l’auteur. « Mais je ne voulais pas inscrire les héros dans une réalité trop présente, trop réelle ».
Peintre à ses heures, grand lecteur, admirateur passionné de Flaubert (ci-contre), Régis Di Giorgio a donc commencé à écrire tout jeune son « Germain ». « Je pensais écrire une petite nouvelle, construite autour des règles du jeu de tarot. Finalement, les personnages ont pris, au fil du temps, une vie indépendante de ma volonté et j’ai laissé tomber l’histoire du tarot ! ».
Tour à tour étudiant en lettres, histoire de l’art et archéologie, cuisinier, responsable culturel, infographiste, l’auteur planche actuellement sur le deuxième volet de « Germain ». Cette fois, pas question d’attendre plus de dix ans la publication : le second et dernier opus devrait sortir l’an prochain. Mêmes personnages et même démarche : « J’essaie de ne pas donner aux lecteurs un chemin. J’ai plus envie de les perdre que de les guider ».
Tout sauf les voies toutes tracées : en parallèle de son activité littéraire, le Charmontais, natif de Montbéliard et qui a longtemps vécu à Strasbourg, planche sur un essai autour du labyrinthe. Même s’il ne s’agit pas d’un roman, il y aura aussi de quoi se perdre dans cette exploration, à la fois ethnologique, géographique et ésotérique. Mais, parfois, ne pas trouver sa route fait tout le sel de l’aventure.
Sophie DOUGNAC
AU GUEULOIR !
Régis Di Giorgio, qui a commencé à écrire son roman, « comme un déclic » à la mort de Samuel Beckett, est un écrivain à l’ancienne. Il rédige à la main, sur papier blanc d’un certain grammage et avec un stylo noir ! Mieux encore, ce perfectionniste s’inspire de son idole Flaubert : il passe son travail au gueuloir. C’est à-dire qu’il relit à haute et intelligible voix ses écrits pour les corriger et/ou les améliorer. Histoire aussi de » faire résonner les mots ». Ses voisins doivent être contents…
Tiré pour l’instant à 300 exemplaires chez « les Amis du Lézard vert », « Germain », sorti en décembre, est disponible au prix de 12 € à la librairie Nicod à Valentigney et prochainement, l’auteur l’espère, à l’espace culturel du Leclerc et au Chapitre.