l'association

Il n'est pas facile, pour un auteur Franc-Comtois, de trouver un éditeur qui accepte de publier ses livres. Je vous épargne le couplet sur les génies méconnus, les illustres auteurs à compte d'auteur (Rimbaud, Verlaine, Proust, Stendhal, Poe, Joyce...), tout cela est superbement présenté dans un livre d'Umberto Eco, le Pendule de Foucault. Plutôt que de continuer à essuyer des refus un peu démoralisants, il m'a semblé plus commode de créer une association pour répondre à ce besoin d'être lu.
Celle-ci ne dégage bien entendu aucun bénéfice, mais l'excédent apparaissant sur le compte de résultats est aussitôt réinvesti dans l'édition d'un ouvrage à paraître ou dans la réédition d'un livre épuisé.

Les ressources de cette association viennent de la vente des livres et de recettes encaissées lors des soirées-lecture que j'anime quelquefois. Je lis alors des extraits de mes ouvrages et aussi, fréquemment, des nouvelles inédites dont certaines sont en ligne sur ce blog. Enfin, je ne suis pas un expert en informatique et la mise à jour de ce blog est laborieuse. Soyez indulgent pour les petites fautes de mise en page, d'avance merci.


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samedi 11 février 2012

Fumées d'Usine

Sur son cyclomoteur, gros dos comme un chat contrarié, Bernard Gondard rentrait chez lui en slalomant entre les voitures. Sa journée de travail l’avait laissé éreinté, les oreilles bourdonnantes, les mains tremblantes, la plante des pieds talée d’avoir piétiné huit heures devant sa machine. Il n’avait plus l’énergie suffisante pour réfléchir et sa courte expérience de la vie lui soufflait que, s’il avait essayé de tirer des conclusions ou de faire le point à cet instant, il aurait été submergé par une vague de découragement, de pessimisme et de négativité. Alors autant ne pas penser pour le moment. Rentrer, fumer une cigarette, boire une bière, manger et se coucher. On verra après.

Ultime contrariété avant de quitter l’Usine, il avait été ralenti par des distributeurs de tracts qui sévissaient à la portière. Si la diffusion de littérature antipatronale était habituellement un sport risqué, ce jour-là, les diffuseurs ne semblaient pas particulièrement inquiets. Aussi sûrs d’eux, même, que des vendeurs de l’Huma devant une mairie de la banlieue rouge, songea Bernard à part lui. Ils parlaient fort, regardant à peine la foule fatiguée qui s’écoulait. Les ouvriers d’origine étrangère s’écartaient prudemment en passant devant eux, acceptant parfois un tract quand ils ne pouvaient faire autrement : ils ne se sentaient pas concernés mais ne voulaient pas non plus d’histoires avec les militants, du moins pas ceux-ci. Le syndicat dont ils faisaient la promotion était la C.F.T.[1] et il valait mieux être dans leurs bonnes grâces. Bernard n’avait pas les mêmes raisons de les craindre et, avec une moue dégoûtée, refusa le tract tendu. Les pseudosyndicalistes lui lancèrent des regards aigus, comme s’ils le prenaient en photo pour plus tard. Lui s’empressa de rejoindre le garage pour deux roues et fit démarrer sa machine pour prendre le large.


[1] la C.F.T. : Confédération Française du Travail. LE syndicat du patron dans les années 1960-1970. Cette officine était implantée dans bien d’autres lieux allergiques aux syndicats, Peugeot, FIAT, la Ville de Paris.

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